Ce qui s’est dit… le 23/10/2016
Le JDD parle du Foodbook#6 dans un article sur le “Pairing”, la nouvelle expérience gustative.
L’un ne va pas sans l’autre. Dans son coquetier apéritif,
un oeuf saumuré, fringuant, attend que son binôme, le
cocktail, le rejoigne sur le comptoir du bar Pasdeloup (Paris 11e), dans son
élégant verre à pied. Avant de déguster l’ensemble, le barman explique
la méthode!: il faut croquer et boire alternativement dans l’un et l’autre,
afin que les arômes se mélangent en bouche. Le charme et la surprise
opèrent!: la douceur du cocktail à base de gin, Velvet Falernum, bière ambrée et jus de citron enrobe l’acidité de l’oeuf, l’effervescence répond à son piquant.
Cette expérience sensorielle réjouissante, à la frontière de la gastronomie
et des spiritueux, s’appelle le « food pairing »!: l’expression n’est en
fait que l’anglicisme d’une méthode ancienne!: l’accord mets-vins. Le pairing dépoussière cette pratique qui marie traditionnellement les talents d’un chef et d’un sommelier, en lui ajoutant des accords nouveaux, avec les cocktails et la bière.
C’est le restaurant Dersou (Paris 12e), ouvert l’année dernière, qui a le
premier réveillé les papilles françaises, avec les prouesses du chef Taku Sekine et du barman Amaury Guyot pour leur menu d’accords mets-cocktails. Le chef Daniel Baratier et le sommelier Alexandre Céret ont aussi lié leurs talents respectifs aux Déserteurs (Paris 11e). Également accros au pairing, les bars à cocktails ont fleuri comme des
champignons depuis que la France a rattrapé son retard en la matière!:
Mabel, Mary Céleste, Bluebird, Entrée des artistes, The Beast, Shangri-La…
« Une construction culinaire nouvelle »
Ainsi, Pasdeloup et sa barmaid Amanda Boucher proposent de nouveaux
pairings chaque mois. « Avant de connaître Amanda, je ne me préoccupais
pas des alcools en cuisine, explique la chef Lina Caschetto. Aujourd’hui, nous travaillons ensemble de trois façons!: pour marier deux produits proches l’un de l’autre, pour faire ressortir un ingrédient d’un plat grâce à un cocktail ou enfin pour associer deux produits qui ne seraient pas bons l’un sans l’autre mais qui sont délicieux ensemble. »
Ces quelques adresses rivalisent d’inventivité mais le food pairing n’est
pas pour autant à la portée de tous. « Cela peut devenir un exercice de style compliqué si les accords sont trop nombreux ou trop riches, témoigne Luc Dubanchet, qui consacre un dossier au sujet dans le
dernier Omnivore Foodbook (19,90 €). Quand il est réussi, ce vrai travail d’association est une construction culinaire nouvelle qui fait naître une vraie émotion. »
Paradoxalement, les meilleures associations ne seraient pas celles de la tradition culinaire française… « Le pairing est fort quand il sert un propos simple, il ne s’agit pas d’alourdir un repas ou d’en mettre plein la vue, estime Luc Dubanchet. Le pairing, c’est l’inverse du foie gras-Sauternes-pain brioché… La France aime associer du riche avec du riche alors qu’il faut plutôt jouer avec la modicité d’un ingrédient et la richesse d’un vin. »
Cette nouvelle pratique participe au décloisonnement de la cave, de la
cuisine et de la salle puisque chefs, sommeliers et barmen, faisant fi de
leur ego, partagent leurs inspirations!: « Ils goûtent les produits ensemble, interagissent et sont stimulés par cette création », conclut le créateur d’Omnivore. Une effervescence qui réussit à la brillante France des cocktails!: Jennifer Le Nechet, barmaid du Café moderne à Paris, vient de décrocher le titre de meilleur bartender du monde au World Class 2016.