Ce qui s’est dit… le 21/11/2013

Femen,
dégénérescence
et produits dérivés

“À l’image du panda du WWF ou du visage du Che, certaines icônes ont perdu de leur superbe dans les antres de la consommation de masse. Le premier calendrier consacré au groupuscule des Femen a été publiée par une maison d’édition parisienne. Et si ces filles topless et fleuries étaient en passe de devenir une simple image de marque ?” Par Lucie Etchebers

“Oubliés les chatons du mois de février et le mignon caneton illustrant les pages du mois d’avril, cette année il y aura des seins, des seins et des seins. La France, grande nation du calendrier, sera chaque mois rythmée  par les photos topless des activistes Femen. Le créneau des éphémérides dénudés est a priori déjà pris par quelques irréductibles du genre, comme  les « dieux » du stade français ou une certaine Clara Morgan qui a désormais du souci à se faire.

A l’origine du projet, la nouvelle maison d’édition Le Contrepoint qui s’est amusée à associer des œuvres d’art à l’imagerie spécifique qui a émergé des interventions spectaculaire des militantes. Douze instantanés des Femen, alliés à douze tableaux ou sculptures qui ont marqué l’histoire de l’art. Astucieux coup commercial pour le premier projet de l’éditeur, qui n’a cependant pas demandé aux Femen de se joindre au projet. Les photos ont simplement été achetées auprès de l’Agence France Presse. A la question de savoir si l’association de l’image politique des Femen à ce produit commercial pourrait desservir leur cause, la maison d’édition répond non. Leur argumentaire en revanche ne convainc qu’à moitié : « ce n’est pas le calendrier des Femen.  L’objectif du projet n’est pas de parler de leurs revendications politiques mais juste de mettre en valeur leur iconographie qui convoque la problématique du nu dans l’histoire de l’art. »

La photo du mois de décembre :

 

Ce n’est pas la première fois que l’image politique du groupe féministe est détournée à des fins commerciale sans leur accord. En juin 2013, le magazine Citizen K avait  lancé la campagne Luxury Riot  menée par le photographe Fred Meylan pour promouvoir des bijoux Cartier et Fabergé. La marque française de sous-vêtements Undiz a également exploité le filon en imprimant l’image d’une Femen édulcorée sur une série de dessous. Le plus étonnant est que les Femen elles-mêmes écornent leur image au détriment de leur crédibilité politique. Sur leur site officiel, on trouve évidemment une présentation de l’organisation mais aussi un onglet « Femenshop » sur lequel on peut se procurer t-shirts, casquettes et autres mugs à l’effigie des militantes. Le financement de leurs actions par la vente de leurs produits dérivés a toujours été au cœur de leurs discours mais l’expansion de leur visibilité médiatique et de leurs interventions ces dernières années a sérieusement jeté un doute sur l’existence de ce financement unique.

 

Si les Femen ont toujours été contestées par la nature de leur mode d’action, leur mot d’ordre, féministe au départ, est aujourd’hui de plus en plus flou. Islamophobes, homophobes, colonialistes, les rumeurs circulent et le message est nébuleux. Quant à leur légitimité politique, elle semble  être petit-à-petit grignoté par le consumérisme.”